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Caravana Obscura (Christine Felten et Véronique Massinger)1950 (BE) - 1947 (BE)

Avant de se rencontrer, Christine Felten effectue un passage à l’Institut des Arts de diffusion où elle étudie la mise en scène. Véronique Massinger, elle, réalise deux années à l’Institut Supérieur Saint-Luc en architecture d’intérieur. Toutes deux sortent ensuite diplômée de l’Ecole supérieure des arts de l’image « Le 75 » à Bruxelles mais à quelques années d’intervalle. Elles se rencontrent en 1975 aux Ateliers de la rue Voot où elles enseignent. En 1989, elles réalisent leur premier projet en binôme : la construction d’une camera obscura géante de 3 x 3 x 2 mètres dans le cadre d’une exposition collective des centres d’expression et de créativité de la Fédération Wallonie Bruxelles de Belgique. Mais le projet ne s’arrête pas là. L’année suivante, elles fondent l’Association Felten-Massinger qui consacre leur collaboration photographique par la création de Caravana Obscura asbl. Depuis une trentaine d’années, elles parcourent le monde, se rendant de biennales en foire avec des œuvres de plus en plus maîtrisées et très personnelles, poursuivant leur quête de l’image unique et non reproductible.

L’œuvre de ces deux artistes complices se caractérise par un dispositif baptisé « Caravana Obscura » en référence à la « Camera Obscura », ancêtre de l’appareil photographique. Comme son nom l’indique, il s’agit d’une caravane de camping transformée en chambre noire géante et mobile. Vidée de tout confort et repeinte en noir, la caravane est percée d’un trou minuscule de 1,407 mm à l’arrière et sur un des côtés. Un papier sensible est fixé sur un panneau disposé en arc de cercle à l’intérieur. Déplaçable et orientable, ce panneau permet de capter des paysages et des autoportraits. Les photographies sont donc réalisées sans optique et l’image enregistrée sur le papier réversible constitue un original unique et fragile.

Face à ce procédé quelque peu aléatoire du sténopé, il est difficile de maîtriser complètement le projet. La distance entre les attentes et le résultat est parfois grande. Tout d’abord, le duo doit trouver où et quand installer leur appareil de taille et pouvoir l’orienter de façon à obtenir le cadrage désiré. De plus, le temps de pose pouvant varier de 15 minutes à 24 heures, les emplacements possibles sont souvent restreints. Si les lieux photographiés sont choisis en fonction de ces contraintes, ils sont souvent chargés d’histoire. Des paysages panoramiques urbains et industriels avec lesquelles les artistes interrogent la notion de territoire avec un intérêt pour la démarcation de la ligne d’horizon qui sépare la terre et le ciel. Leurs photographies présentent également depuis toujours un intérêt pour l’eau. On retrouve dans leur répertoire des clichés moins connus comme des fictions et des autoportraits.

Les images résultantes transmettent un sentiment d’étrangeté, de désolation, de mélancolie. Le soleil se lève, décrit toute une trajectoire dans le ciel et se couche dans leurs photographies. Les détails, qui ne sont pas portés par des ombres nettes, s’effacent au profit de la structure. Ne reste que ce qui est stable et fixe tout au long des heures. À se diluer ainsi dans le temps, les couleurs du paysage perdent leur intensité, leur saturation et, quand elles atteignent le papier sensible, elles sont déjà comme vieillies. Le vignettage en bord de champ renvoie le spectateur à une impression intériorisée du paysage. Et de se poser la question de reconnaître non pas le paysage offert mais l’effet qu’il a sur lui.