Franck Scurti avait comme désir premier de devenir graphiste. Il a étudié aux Beaux-Arts de Saint-Etienne (1986-1989) et ensuite aux Beaux-Arts de Grenoble (1989-1991). Depuis le début des années 1990, son travail a fait l’objet de plusieurs expositions personnelles en France (notamment Before and Afteren 2002 au Palais de Tokyo) mais aussi à l’étranger (Liverpool Jackpoten 2007 à la Biennale de Liverpool ou Air-Mess en 2006 à Tokyo). Il est souvent catégorisé d’artiste Post-pop ou Néo-pop par ses références à la société de consommation, d’héritier des deux Marcel, Duchamp et Broodthaers. Mais également de par son intérêt pour les objets du quotidien, qu’il interroge avec subversion ou encore de « très imprégné » de Fluxus pour son goût de la provocation, de l’humour et du détournement. Franck Scurti se défend de toute unité stylistique ou étiquette. Il est d’autant plus délicat de classer son travail dans une discipline qu’il utilise des registres visuels totalement différents (logos, affiches, ville, espace public/intime, objet de consommation courante, télévision, publicité, match, BD, etc.). Les catégories artistiques sont aussi variées que la photographie, la vidéo, la peinture, la sculpture et l’installation.
La rue, le quotidien, la rencontre inopinée sont ses outils de première main. Franck Scurti pose la question du comment et du pourquoi une chose vient à être et interroge l’acte de créer. Il est inspiré par le poète français Francis Ponge qui, au début du XXe siècle, s’intéressa aux objets les plus humbles tentant de révéler le caractère ontologique des choses.
Laissant une part importante au hasard et revalorisant les déchets de notre société de consommation, l’artiste lyonnais cherche des idées dans tout ce qui l’entoure. Ce peut être des objets trouvés en bas de chez lui ou ramassés dans des décharges (une page de journal, une brique, une boîte de conserve) ou des éléments historiques et politiques glanés dans l’actualité internationale. Il reproduit ainsi, en volume et à l’échelle, la porte d’une boulangerie comprenant des informations commerciales entre les deux poignées en forme de pain (Sandwich, 1998) ou une publicité déchirée dans le quotidien Libération réimprimée puis affichée dans les rues de Paris sur laquelle il inscrit « Wanted », réflexion à la fois sur la reproduction des médias et une forme d’activisme sociale ou encore représente des enseignes lumineuses (pharmacie, tabac, lotto) légèrement déformées, comme vues dans une flaque d’eau (Les Reflets, 2002).
Chacun de ses travaux est ainsi issu d’un système de liens dérivés d’associations parfois inattendues. Le résultat de ces « accidents » crée une collection d’objets et d’images basés sur leurs relations formelles et conceptuelles. « Je cherche à déstabiliser tout ce qui fait autorité, à mettre en rapport des codes sociaux et des formes artistiques, à donner du poids à des images qui n’en ont pas et à en enlever à celles qui en ont trop ». Avec humour et dérision, Franck Scurti s’attaque donc à des conformismes de vision, travaillant souvent avec ce qui reste de nos aprioris et de nos manières de regarder les choses. S’il se réfère souvent à l’histoire de l’art et à l’esthétique, c’est surtout les codes de l’époque et les enjeux politiques du moment qui l’amènent à penser ses œuvres de manière à ce que chaque pièce réalisée soit une forme ouverte. Trois œuvres réalisées sur une large période en présentent un bon exemple de l’analogie dans sa démarche : Chairs(1994), neuf reproductions exactes d’un petit modèle en forme de siège que l’artiste a réalisé à partir d’un couvercle de boîte de conserve ; Mobilis in Mobilis (1996), une brique de lait reproduite à une telle échelle qu’elle devient une caravane dans laquelle le visiteur prend place pour découvrir le contexte environnant et N.Y. 06:00 AM (1995-2000), une boîte de sardines transformée en un lit évoquant le conditionnement de l’individu par la société de consommation.