La peinture de Marcel Berlanger laisse voir le processus de fabrication. Derrière l’image facilement reconnaissable, la peinture rappelle qu’elle n’est qu’une peinture ; comme le gille rappelle que, durant le carnaval, l’ordre des choses est renversé, le pouvoir n’est qu’accordé et passager.
Jouant des rapports entre le réel et l’imaginaire, le voir et le regarder, L'Autruche représente un Gilles de Binche ; ou plutôt le laisse deviner, puisque seules sont apparentes les plumes d’autruche qui ornent sa coiffe. Réalisé dans un léger dégradé du mauve vers le bleu, la touche est plus affirmée dans les ombres mais jamais complètement colorée de manière à créer un espace, une profondeur. Des petits points blancs restent perceptibles afin de laisser pénétrer la lumière et rappeler l’origine photographique du motif. La partie inférieure de la toile est composée de traits à la bombe recouverts, non sans une certaine violence, de peinture blanche. Cette division du tableau n’est pas sans rappeler la technique du collage d’où découlent, pour le spectateur, des contradictions optiques et tactiles perturbant son appréhension de l’œuvre.