Benoît Platéus est diplômé de l’Ecole de Recherche Graphique (ERG) à Bruxelles en 1998 et lauréat du Prix de la Jeune Peinture Belge en 2003. Il ne se prive d’aucun outil (photographie, vidéo, dessin, peinture ou sculpture) pour traquer l’ambiguïté du visible et interroger les principes de reproduction. Dans ses premiers travaux, l’artiste photographie des espaces quotidiens qui l’entourent en accordant une attention particulière à la manière dont les jeux d’ombre et de lumière perturbent et déconstruisent les images. Ainsi ses photographies contredisent l’idée reçue selon laquelle la photographie peut saisir la réalité.
Tout en conservant de manière constante une pratique photographique, Benoît Platéus travaille également beaucoup avec des images trouvées dans les magazines, les livres et les bandes dessinées qu’il soumet ensuite à la photocopieuse. Avec cet appareil commun, il les transforme, recadre, agrandit, brouille les couleurs, multiplie, intervient sur le trait ou en extrait des détails. Le but de ces opérations de déconstruction d’images est moins analytique que poétique. L’artiste cherche à montrer le décalage de lectures que contiennent ces images échappant ainsi à un sens univoque.
Explorant les possibilités de dégradations des conditions d’existence de l’image, il travaille à partir de planches de bandes dessinées (Brooom, 2007) reproduites en grand format qu’il maltraite, floute, éclabousse et ampute de leurs phylactères grâce au photocopiage et à divers logiciels informatiques. Plus aucune histoire n’est lisible dans ces nouveaux espaces ainsi créés où les figures sont déformées, les planches fortement colorées et où les cases « coulent » les unes sur les autres. Le dessin devient mouvant et prend des allures de graphisme abstrait provoquant une tension optique dérangeante.
La série Stereo (2008), constituée de reproductions de photographies photocopiées, montre des intérieurs luxueux composés de lits et de canapés sur lesquels sont alanguies des jambes féminines aux pieds chaussés de talons aiguilles, des balustrades et colonnades et des appareils de musculation clinquants. Les sujets sont flous, les couleurs passées et les traits dédoublés. L’ensemble semble être regardé au travers d’un verre d’eau. À ces photographies, semblent avoir été superposées d’autres images qui métamorphosent l’image initiale et la fragmentent pour ébranler notre perception et ainsi ouvrir un autre champ possible d’interprétation. Une autre série de photographies, intitulée Ghostburn, provient d’une sélection d’images de personnalités tirées de l’affichage publicitaire (K.W. [Kate Winslet], 2014) rephotographiées sous le reflet de la lumière du soleil. Comme le titre de la série l’indique, les images semblent brûlées, laissant apparaître de nouvelles formes, celles de personnages fantômes jouant sur une part d’énigme.
A travers ces deux séries, Benoît Platéus s’intéresse à la reproductibilité technique, son infaillibilité et l’idée d’authenticité. Qu’est-ce qui fait qu’une image est toujours une image ? Est-il (im)possible d’échapper à l’original ? L’artiste emmène le spectateur dans les ailleurs que chaque image enferme. Il montre le potentiel insoupçonné de ces images quasi stéréotypées qui, une fois manipulées, peuvent se démultiplier et recouvrer un peu plus d’humanité.